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Dans nos territoires, comme à l’étranger, le plaidoyer pour l’eau est nécessaire

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Le 9ème Forum mondial de l'eau (FME), organisé à Dakar (Sénégal) du 21 au 26 mars 2022, sera un moment clé pour la communauté internationale de l’eau.

André Viola, Président de la Commission relations internationales du comité de bassin Adour-Garonne et Président de la Communauté de communes Piège, Lauragais, Malepère, participera à ce Forum. Il a répondu à nos questions.

En matière de coopération et de solidarité internationales dans le domaine de l’eau, quel rôle peuvent jouer les collectivités ?

Il est très important que les collectivités territoriales s’engagent à l’international, c’est aujourd’hui une nécessité. Il n’y a pas que les Etats qui sont acteurs de la coopération internationale.

Concernant les Objectifs de Développement Durable (ODD), fixés au plan mondial, ils ne pourront être atteints, d’ici 2030, qu’avec une implication forte des collectivités territoriales, notamment en ce qui concerne des objectifs essentiels comme les mobilités, le logement et, bien sûr, l’eau.

L’objectif « eau et assainissement » est essentiel et de nombreux autres objectifs lui sont liés : la lutte contre la pauvreté, la bonne santé, l’égalité des genres, etc.

En France, nous disposons d’un outil : le cadre d’intervention institué par la loi « Oudin-Santini » (2005), relative à la coopération internationale des collectivités territoriales et des agences de l’eau, qui leur permet de consacrer jusqu’à 1% de leurs ressources eau et assainissement pour mener des actions de solidarité à l’international.

En tant qu’élu local, je suis très attentif à ce que l’objectif de 1% soit atteint et au développement de « l’exemplarité ». J’ai ainsi contribué autant que possible à mettre en œuvre, dans les collectivités que j’ai eu à gérer, des coopérations dans les domaines de l’eau potable et de l’assainissement.

En tant que président de la Commission des relations internationales du comité de bassin Adour-Garonne, je cherche à amplifier ce travail et à promouvoir l’exemplarité.

De la part des agences de l’eau, il y a un engagement très fort

Elles se sont engagées, il y a quelques années, à atteindre cette part de 1%  de leur budget consacré à l’international, ce qui est quasiment réalisé aujourd’hui  pour la plupart des agences de l’eau, avec un total annuel de plus de 15 millions d’euros en moyenne.  

Nous pouvons souligner que pour la première fois, l’an dernier, a été lancé un appel à projets commun, permettant de mutualiser les ressources financières des 6 agences de l’eau, afin de favoriser l’émergence de projets de solidarité. Plusieurs collectivités et associations ont pu être accompagnées sur des projets nouveaux de coopération et de solidarité sur l’eau.

Par ailleurs concernant notre gouvernance, son organisation et les actions menées suscitent l’intérêt à l’international : l’implication des élus, des chercheurs, des différents utilisateurs de l’eau, agriculteurs, entreprises, consommateurs… Le comité de bassin est le lieu de concertation privilégié de tous les acteurs qui s’impliquent sur ce sujet de l’eau. Souvent à l’international, cet exemple est mis en avant : on parle du « modèle » des agences de l’eau et du travail mené par les comités de bassin.

Dans nos territoires, comme à l’étranger, le plaidoyer pour l’eau reste nécessaire

Sur ce sujet complexe de l’eau, qui concerne évidemment tous les pays, il est indispensable de discuter très en amont, dans des instances organisées pour cela et dans lesquelles les échanges entre les différents utilisateurs de l’eau peut se faire, hors contexte de crise. Et cela justement pour prévenir, au mieux, les situations de crise – et savoir répondre, le cas échéant, à ces situations de tension qui, malheureusement, ont tendance à se développer.

En effet, la question du partage de l’eau peut être à l’origine de conflits sociaux, économiques et politiques, y compris dans des relations interétatiques. Concernant les bassins transfrontaliers, le « modèle » qui repose sur une concertation de tous les acteurs de l’eau (comme cela est le cas en France depuis de nombreuses années), a tout son intérêt.

Quelles sont vos attentes concernant le Forum de l’eau à Dakar, auquel vous participerez ?

Mes attentes sont de deux ordres :

Premièrement, ce forum s’inscrit dans la perspective de la Conférence mondiale sur l’eau prévue à l’ONU l’an prochain (en mars 2023) pour l’examen, à mi-parcours, de la réalisation des Objectifs de la décennie internationale d’action sur l’eau et le développement durable (2018-2028).

Le Forum mondial de l’eau à Dakar constituera une préparation à cette rencontre à l’ONU.

Sur les secteurs eau et assainissement, les objectifs de développement durable (ODD) ne sont pas encore atteints. Le forum mondial de l’eau est l’occasion de souligner les efforts supplémentaires à réaliser pour atteindre ces objectifs en 2030.

Deuxièmement, ce sera une satisfaction de pouvoir mettre en avant un projet que le département de l’Aude mène, depuis trois ans, avec plusieurs collectivités européennes (en France et en Italie) et deux collectivités d’Amérique du sud, au Pérou et en Equateur, sur la gestion des risques et la prévention des inondations. Ce projet fait partie des 126 projets labellisés « Initiative Dakar 2022 », ce qui contribuera aussi à un partage des initiatives et expériences en matière de coopération décentralisée.